José représente une gauche antilibérale, antiraciste, féministe et...
José Bové : "Je représente une gauche antilibérale,
antiraciste, féministe et écologiste"
PROPOS RECUEILLIS PAR JEROME RIVOLLET
FRANCE - José Bové a décidé d'être candidat à l'élection présidentielle française et croit encore possible d'aboutir à une candidature unitaire au sein de la gauche antilibérale.
En annonçant jeudi dernier sa candidature à l'élection présidentielle française, José Bové a déjà réussi un tour de force: briser le doux ronronnement médiatique orchestré autour du duel Sarkozy-Royal. L'espace de deux jours, la campagne électorale s'est en effet focalisée sur la décision du leader altermondialiste, mettant provisoirement sous l'éteignoir les polémiques et les petites phrases distillées par la droite et le Parti socialiste. Après avoir dans un premier temps renoncé à incarner la candidature des comités antilibéraux, José Bové s'est ravisé, encouragé par une pétition en sa faveur qui, en quelques semaines, a récolté 35 000 signatures électroniques1. Celui qui s'est désigné comme «le porte-parole des sans-voix» a déjà prôné quelques-unes des priorités des collectifs qu'il incarne: mettre fin au dogme libéral, rendre crédible la gauche alternative et, surtout, barrer la route à Nicolas Sarkozy, «un homme dangereux». Se réclamant d'une candidature collective issue de la société civile, il ne désespère pas de rallier derrière lui les autres candidats de la gauche antilibérale. Parce qu'il s'est déclaré assez tardivement, José Bové est également un homme pressé. Il dispose jusqu'au 16 mars pour obtenir les 500 signatures d'élus nécessaires pour valider sa candidature. D'ici là, lui et son entourage ont prévu de faire un point hebdomadaire pour évaluer la dynamique populaire engendrée par cette candidature et sur l'opportunité de maintenir celle-ci ou non. Entre les multiples sollicitations liées au lancement de sa campagne, le militant anti-OGM, qui reste sous la menace d'une incarcération, livre les raisons de son choix et le sens de sa candidature.
Fin novembre, alors que les comités antilibéraux étaient enlisés dans le processus de désignation d'un candidat unitaire, vous renonciez à être ce candidat. Depuis la semaine dernière, vous êtes officiellement entré en campagne. Pourquoi ce revirement?
Je m'étais retiré car la situation n'était pas claire. Le patriotisme des appareils politiques avait alors enrayé la dynamique des collectifs. Début janvier, les militants de ces collectifs ont lancé une pétition réclamant ma candidature. Celle-là, en quelques semaines, a récolté des dizaines de milliers de signatures. Les 20 et 21 janvier, les collectifs unitaires antilibéraux2 se sont réunis et ont décidé de soutenir une candidature collective incarnée sur mon nom. Devant cette dynamique et cette décision, j'ai décidé de représenter cette gauche antilibérale, antiraciste, féministe et écologiste.
Mais vous n'êtes pas moins de cinq candidats à vous réclamer de cette gauche antilibérale. Dans ce contexte, l'idée d'une candidature unitaire a-t-elle encore un sens?
Elle a encore un sens bien sûr. Nous appelons toujours à l'unité. Des militants des partis politiques n'ont pas accepté la manière dont leurs leaders ont fractionné le mouvement unitaire. A nos côtés, nous avons des militants et des élus issus du Parti communiste, des Verts et des autres mouvements de la gauche antilibérale qui s'affirment avec nous.
Le philosophe Michel Onfray, qui a suivi ce processus unitaire, a fustigé les problèmes d'ego intervenus entre les différents leaders susceptibles d'incarner cette candidature3. Vous concernant, et bien qu'il vous soutienne, il a regretté votre manque de stratégie et, en quelque sorte, de vous être trop fait désiré. Avec du recul, n'avez-vous pas commis une erreur en renonçant dans un premier temps à vous présenter?
Fin novembre, j'avais compris que la situation était bloquée. Ma position a permis d'empêcher les responsables des partis politiques de récupérer le mouvement unitaire. Car sur le fond, il fallait un candidat qui ne soit pas identifié à tel ou tel parti. Les choses n'avaient pas été clarifiées au départ et le piège s'est refermé sur nous. Il fallait véritablement une démarche citoyenne qui permette de dépasser ces clivages.
Quel est le sens de votre candidature?
Il s'agit d'être utile à la gauche pour battre la droite et l'extrême droite. C'est notre objectif. Beaucoup d'électeurs ne votent plus. Il y a une nécessité de parvenir à mobiliser ceux-ci pour contrer Sarkozy qui est un homme dangereux, et qui, s'il est élu, fera entrer ce pays dans une logique de plus en plus libérale et de plus en plus répressive et carcérale. I
Note : 1http://www.unisavecbove.org/
2Le Parti communiste était absent de ce rassemblement et a contesté sa légitimité.
3Le Monde du 30 septembre 2006.
«Nous serons présents lors des législatives»
A gauche comme à droite, la multiplication des candidatures semble être devenue une caractéristique de l'élection présidentielle. N'est-ce pas le symbole d'institutions qui peinent à prendre en compte toute la diversité de la population française?
Dans le cadre de notre projet, les comités antilibéraux ont élaboré une liste de 125 propositions. L'une d'entre elles porte sur une remise en cause de la Ve République, ce système monarchique présidentiel. On ne peut pas se contenter d'un replâtrage. Il faut repenser la Constitution à partir d'une assemblée constituante pour concevoir une nouvelle architecture du pouvoir. Celle-ci doit permettre de redonner réellement le pouvoir aux citoyens. La Ve République donne les pleins pouvoirs au président et cantonne le parlement à un rôle d'exécutant où il n'a plus l'initiative. Il faut d'une part redonner le pouvoir aux élus mais également mettre ceux-ci sous le contrôle des citoyens, en rendant possible leur révocation en cas de contradiction avec leurs électeurs. De la même manière, mais sur un autre plan, nous estimons que les citoyens doivent pouvoir exercer un contrôle dans les entreprises pour empêcher les dégâts de la logique actionnariale qui ne sont pas acceptables.
Les mouvements issus de la société civile rencontrent souvent des difficultés pour
concrétiser leur action dans le champ politique. Pour ces comités antilibéraux, la difficulté ne va-t-elle pas être de concrétiser cette action au-delà de cette présidentielle?
Mais il n'est pas question de s'arrêter à cette élection. Notre démarche s'inscrit bel et bien dans le long terme. Nous serons présents lors des élections législatives qui suivront et en 2008 lors des municipales, avec l'espoir d'une dynamique unitaire.
Aujourd'hui, la Cour de cassation de Paris confirmera ou non votre condamnation à quatre mois de prison ferme1. Quel peut être l'impact de cette décision sur votre candidature?
Cette décision n'aura pas de conséquences immédiates. Il faudra dans tous les cas que celle-ci soit transmise au procureur avant d'être appliquée. Mais dans tous les cas, si j'ai été condamné à 4 mois de prison, je n'ai pas été condamné à être privé de mes droits civiques. Quelle que soit la décision de la Cour de cassation, je pourrai être candidat même si je suis incarcéré. JRT
Sources Le Devoir
Posté par Adriana Evangelizt