Radicale et divisée
Radicale et divisée
L'annonce par José Bové, dans Le Monde du 25 novembre, du retrait "pour l'heure" de sa candidature comme représentant du mouvement antilibéral à la présidentielle de 2007 illustre l'incapacité de la "gauche de la gauche" à sortir du syndrome de la division. La lumière jetée sur cette difficulté, voire cette incapacité, à s'unir est d'autant plus cruelle que le PS, par contraste, a réussi jusqu'ici à se mettre en ordre de bataille presque comme à la parade.
Nul ne sait si, au bout du compte, un accord se dessinera sur le nom d'un(e) candidat(e). Mais les dégâts, en termes d'image, sont déjà faits. Cela fait deux mois que la gauche de la gauche ne parvient pas à désigner son champion, alors même que les premières discussions avaient dégagé plus de convergences que ce qu'attendaient des acteurs surtout unis, jusque-là, par le non au référendum européen de mai 2005.
Les rivalités personnelles et partisanes sont bien sûr présentes. M. Bové n'a pas senti dans les comités "unitaires" de base l'attente qu'il espérait, ce qui a sans doute pesé sur son choix. De manière plus fondamentale, un clivage est apparu entre ceux qui avaient l'expérience du gouvernement (le PCF), voire d'un mandat exécutif local significatif (Clémentine Autain, adjointe au maire de Paris, chargée de la jeunesse), ou même ceux qui voudraient se lancer dans l'aventure (une partie de la LCR) et ceux qui campent sur des positions revendicatives. Ce clivage se retrouve notamment sur la question d'une alliance de gouvernement avec le PS.
Dans l'immédiat, la gauche "radicale" se montre incapable de profiter du créneau ouvert par le positionnement politique et la personnalité de la candidate socialiste. Dès lors qu'il ne réussit pas à occuper à lui seul tout le terrain de la gauche et doit donc faire son deuil d'un premier tour unitaire, qui aurait écarté le spectre d'un 21 avril bis, le PS pourrait trouver avantage à ce que le mouvement antilibéral ait son candidat. Celui-ci lui apporterait au second tour l'essentiel de ses voix - toutes les composantes du mouvement en sont d'accord -, ce qui ne sera pas forcément le cas si celles-ci s'éparpillent dans la nature.
La gauche hors PS a toujours eu beaucoup de mal à sortir de son rôle tribunitien - expression des mécontentements, voire défouloir - pour devenir une force de proposition ou de rénovation aiguillonnant la machine socialiste. Rien n'aurait-il changé depuis l'époque où le PSU, pourtant porteur d'énergie et d'idées neuves, se barrait la route du pouvoir en s'abîmant dans des luttes personnelles stériles et d'insondables querelles idéologiques ? La gauche de la gauche semble condamnée à rééditer l'expérience de Charles Piaget, le leader des ouvriers de Lip, qui renonça à se présenter, en 1974, faute de pouvoir fédérer les mouvements contestataires et autogestionnaires de l'époque.
Sources Le Monde
Posté par Adriana Evangelizt