La force des faibles

Publié le par Adriana EVANGELIZT

La force des faibles

par José Bové

"Sur la photo, nous sommes une soixantaine à marcher vers le quartier général d'Arafat. C'est le concentré des missions mises au point en avril depuis l'arrivée au pouvoir de Sharon. Une mission de la société civile face à la logique d'Etat. C'est dans les réseaux de l'antiglobalisation qu'est née l'idée que des représentants de la société civile devaient se rendre en Palestine pour rencontrer les populations, apporter un soutien actif au peuple palestinien. Une initiative qui se faisait en liaison avec la société civile palestinienne mais aussi avec les réseaux militants israéliens du mouvement de la paix, des réfractaires à l'armée, des "femmes en noir", ces femmes israélo-arabes qui, à l'instar des Folles de Mai en Argentine, manifestent depuis 1987 sur une place de Jérusalem contre la guerre coloniale et les occupations israéliennes.

Ces groupes de soutien se constituant dans d'autres pays, cette initiative est devenue internationale. Notre arrivée était planifiée, c'était la onzième mission, dont le temps fort devait être le 30 mars, la Journée de la Terre qui commémore un massacre de paysans palestiniens perpétré en 1976, d'où la présence avec nous du leader de Via Campesina qui regroupe à travers le monde soixante-cinq millions de paysans et, c'est une fois sur place, en raison de l'ampleur de l'offensive israélienne, que les Palestiniens nous ont demandé de forcer le blocus et d'aller à la Mouqata'a, le quartier général d'Arafat assiégé pour porter secours aux blessés, sortir les morts...

Nous sommes partis de l'hôpital, une marche-manifestation de quarante-cinq minutes dans les rues désertées de Ramallah occupée par l'armée israélienne avec des têtes qui apparaissaient quelquefois derrière un rideau, une main qui nous faisait signe car les habitants savaient par la télévision que des "internationaux" se trouvaient en ville.

Je porte une boîte avec des instruments chirurgicaux, on avance et, à chaque pas, on se dit que c'est un de plus, on se sent forts ensemble, on n'a pas le temps de penser. Il n'y a pas eu de réaction en face, la surprise a été totale, quelques tirs d'intimidation, et puis surtout, on a eu le culot de recommencer le lendemain, avec les télévisions cette fois.

On voulait montrer que quelque chose est toujours possible, la force des faibles contre l'incapacité des politiques, des diplomates, et concrètement faire entrer le plus d'"internationaux" dans la Mouqata'a pour servir de bouclier humain et empêcher ainsi l'élimination physique d'Arafat et de ses proches."

Sources : Positions

Posté par Adriana Evangelizt

Publié dans José et la Palestine

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